RIO SIL

RIO SIL

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Aujourd’hui les mines ont fermé et peu de trains empruntent la vallée. On pêche la truite, on descend le Rio en raft. De ça de là, on creuse mais c’est pour dégager quelque charnier de fusillés, dinamiteros, « maquis », instituteurs socialistes, pédés… Qu’est il advenu de la dépouille de ceux qui n’eurent même pas droit à la balle, mais furent précipités du haut du pont de las palomas, dans l’effroi d’un despeñaperros renouvellé d’une antique barbarie ?

 

Le pont tremble et gémit sous le faix de gigantesques semi-remorques. Je veux croire qu’il frémit d’horreur rémanente.

 

Il se fait tard. Voici un bourg.

Eglise poussiéreuse, poste de secours de la croix rouge, agences bancaires.

Dans le granit des façades, une survivance de petits commerces, qui n’ont d’autre avenir que celui que leur destine la loi du (super)marché…

Et au détour d’une rue, plus vrai que dans la chanson de Victor Manuel, vous tombez sur le Grand père « picador »…

Sentado en el quicio de la puerta,

el pitillo apagado entre los labios,

con la boina calada y en la mano

una vara nerviosa de avellano.

 

Que recuerda su frente limpia y clara,

quizá la primavera deshojada,

el olor de la pólvora mojada,

o el sabor del carbón mientras picaba.

 

El abuelo fue picador

allá en la mina,

y arrancando negro carbón

quemó su vida.

 

Se ha sentado el abuelo en la escalera

a esperar el tibio sol de madrugada

la mirada clavada en la montaña

es su amiga más fiel, nunca le engaña.

 

Temblorosa la mano va al bolsillo

rebuscando el tabaco y su librito

y al final como siempre murmurando

que María le esconde su tabaco.

 

El abuelo fue picador

allá en la mina,

y arrancando negro carbón

quemó su vida.

Juan Andres Escurdia, peintre fuligineux

Objets miniers ou ferroviaires

Huile minérale sur bois de coffrage

(collection particulière)

 

Ténus et tenaces comme le mégot  sur la lèvre du grand-père picador surgissent un peu partout les fantômes du passé. Le pont de las palomas c’est l’horreur à chaud, immédiate. Remontons vers la Navarre, pour un peu d’horreur administrative. Près de Pampelune, Lumbier est la ville natale de Gabriel Rebole, lieutenant de mitrailleuses . Pour « être rouge » il est jugé par un tribunal militaire (ci joint le jugement en espagnol page 1  &  page 2  et sa  traduction page 1 &  page 2 ) Après un réquisitoire qui aujourd’hui constitue l’éloge indiscutable des vertus de ce combattant le ministère public requiert 26 ans et 8 mois de prison, le « défenseur » obtient la peine de mort. Ubuesque.

Gabriel Rebole faussera compagnie à ses bourreaux. Le 14 avril 2007 il était à Irun pour célébrer la République. 92 ans et toujours ardent.

 

Fin de ce « giro dell’oca ». Avant d’emprunter le tunel du somport,  je m’arrête au village de Canfranc, devant lequel je suis passé des centaines de fois sans avoir la curiosité de visiter cette rue coincée entre la route nationale et le torrent. Les maisons massives, promues immeubles, sont la proie des promoteurs immobiliers. Se vende piso. Se vende piso… et tout à coup, entre le bar fermé à cette heure et l’église, un mat, au haut duquel flotte le Pendón morado. Nous sommes le 17 avril, les cérémonies sont achevées depuis trois jours. Sur un banc de pierre, deux hommes et une femme montent une garde que l’on sent débonnaire mais que l’on pressent farouche. A ma question, relative au maintien du drapeau, la réponse tombe, hypocoristique et sans appel : « parce que, à nous autres, ça nous plait. »

Je ne m’étonne plus de rien, ni des tunnels perçant de part en part les Pyrénées, ni d’une étamine tricolore flottant au vent aigrelet de la sierra.

 

« La moisson de nos champs lassera les faucilles, et les fruits passeront la promesse des fleurs… »

Juan Andres Ezcurdia. Trompe-l’œil allégorique.

Huile de coude sur bois d’arbre.

 

 

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