CITRONS, LIMONS ET GARDE WALLONNE
Juan Andres Ezcurdia Le puit de Fontebranda Huile sur
bois. Fondation Agnelli. Turin.
Il succomba au cours d’une expédition
fourragère durant laquelle ses cavaliers s’efforcèrent d’emporter à deux pas
des remparts une grange mal gardée ; le cheval d’Henri-Maximilien
s’ébrouait gaiement sur le sol tapissé d’herbe sèche ; l’air frais de
février était plaisant sur les pentes ensoleillées de la colline, après les
rues venteuses et obscures de Sienne. Une attaque imprévue des Impériaux
débanda la troupe qui fit demi-tour vers les murs; Henri-Maximilien poursuivit ses
hommes en hurlant des jurons. Une balle l’atteignit à l’épaule; il tomba la tête contre une pierre. Il eut le temps
de sentir la secousse, mais non la mort. Sa monture délestée caracola dans les
champs, où un Espagnol la captura pour la mener ensuite à petits pas vers le
camp de César. Deux ou trois reîtres se partagèrent les armes et les hardes du défunt. Il avait dans la poche de sa
casaque le manuscrit de son Blason du corps
féminin ; ce recueil de petits vers enjoués et tendres dont il
attendait un peu de gloire, ou du moins quelque succès auprès des belles, finit
au creux du fossé, enseveli avec lui sous quelques pelletées de terre. Une
devise, qu’il avait gravée tant bien que mal en l’honneur de la signora
Piccolomini resta longtemps visible sur la margelle de Fontebranda.
Margueritte Yourcenar L’œuvre au noir.
Henri-Maximilien Ligre :
les blasons du corps féminin ;
Le con.
(Fragment sauvegardé et
conservé au Museo
Civico de Sienne)
Petit Moufflard, petit con rebondy,
Petit connin plus que levrier hardy,
Plus que lyon au combat courageux,
Agille et prompt en tes follastres jeux
Connin vestu de ton poil folaston,
Plus riche que la toison de Colcos,
Connin grasset, sans arestes, sans os,
Friant morceau de nayfve bonté,
Loing de danger et bruit de ton voisin,
Qu’on ne prendroit jamais pour ton cousin,
Bien embouché d’un bouton vermeillet
Ou d’un rubis servant de fermeillet
Joinct et serré, fermé tant seulement
Que ta façon ou joli mouvement,
Soit le corps droict, assis, gambade, ou joue,
Si tu ne fais quelque amoureuse moue.
Source d’amour, fonteine de douceur,
Petit ruisseau appaisant toute ardeur,
Mal et langueur : ô lieu solacieulx
Et gracieux, séjour délicieux,
Voluptueux plus que tout autre au monde :
Petit sentier qui droict maine à la bonde
D’excellent bien et souverain plaisir,
Heureux sera cil duquel le désir
Contenteras, qui prendre te pourra
Et qui de toi plainement jouyra.
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